Une nouvelle journée difficile, à cause des conditions météorologiques plus que le profil cette fois-ci. Le parcours, qui visitait les Dombes, ne présentait qu’une côte d’un kilomètre pour seule difficulté. La pluie n’a jamais été mon élément favori, car elle durcit la course, et avantage surtout les hommes déjà les plus costauds… Mais en un sens, je peux gommer un peu ces différences avec un bon placement et un peu plus de niaque que les autres. Ce sont des journées de tension maximale, et de douleur physique un peu plus permanente que les jours secs… Mais c’est ça le cyclisme.
Je m’attends à un coup de bordure lorsque nous changeons de direction, aux alentours du kilomètre 50, alors je reste un peu en retrait en début d’étape, en veillant à ne jamais redescendre tout à fait derrière pour autant. La pluie est continue dès le départ, et rajoute un peu de tension aux premiers kilomètres déjà toujours nerveux. Lorsque je remonte dans les premières positions, le bon coup vient de se former. J’aurais bien aimé être dedans, mais difficile d’avoir des regrets, car quand on n’est pas le plus fort, il faut y mettre toute son énergie ET avoir un sacré coup de chance.
Une fois l’échappée sortie, le rythme devient beaucoup plus raisonnable. Je reste dans les 30 premières positions pendant quasiment 50 kilomètres, mais pas de signe de bordure, à l’exception du seul moment où je redescends à la voiture pour demander du rab de ravitaillement solide, et où je manque de me faire éjecter sur une accélération soudaine. La pluie ne s’arrête toujours pas, et s’alimenter devient de plus en plus compliqué. C’est aux alentours du kilomètre 95 qu’Europcar appuie soudainement le rythme. Je ne m’y attendais pas particulièrement et le vent qui souffle de trois quarts dos à cet endroit devient immédiatement sensible. Je suis aux alentours de la 60e position, à mi-peloton environ, en plein milieu de la ficelle, à appuyer aussi fort que je peux en attendant que ça casse quelque part. Julien Liponne est le premier à connaître un instant de faiblesse et il emmène tout un groupe avec lui. Nous sommes une grosse vingtaines dans cette bordure, et nous ne tardons pas à ramasser le maillot jaune victime d’une crevaison. Je ne suis alors pas trop inquiet, et je reste surtout très concentré à rester dans ce groupe à tout prix. Je me fais un peu surprendre par la seule ascension répertoriée de la journée et je l’aborde mal placé. Elle se monte à un train d’enfer dans notre groupe et je suis certainement un peu trop prudent, croyant qu’elle allait être plus longue. Je suis décroché avec quelques autres coureurs, et j’assiste au passage de quelques avions en sens inverse, notamment d’un Jérémie Maison impressionnant. Le groupe suivant d’une vingtaine me rattrape, à ce point, je sais qu’il s’agit d’un gruppetto qui ne reverra plus jamais la tête.
Nouvelle fin de course en récupération, après avoir été obligé de laisser filer le gros du peloton. Je suis toujours sur la corde raide et le moindre détail m’est fatal, sans pour autant avoir de mauvaises sensations. Le niveau est tout simplement extrêmement élevé. Dans le groupe de lâchés, je suis toujours entouré de mecs qui ont le niveau de gagner en élite. Mais il faut être capable de plus pour peser sur la course. Demain, ce sera l’étape reine, en totalité sur mes routes d’entraînement. Je donnerai mon maximum une nouvelle fois, mais je ne pourrai pas inventer la force que je n’ai pas…