#22 1/2/3/J La Commentryenne
#22 1/2/3/J La Commentryenne

#22 1/2/3/J La Commentryenne

Après le week-end d’Olliergues, je rentre dans une longue période sans objectif, puisque je ne serai pas au départ de la classique des alpes. Avec Vincent, j’ai donc décidé d’en profiter pour caser ma coupure annuelle, sachant que le calendrier est parfaitement vide pendant quasi tout le mois de juin. Je vais donc profiter de ma forme pour courir avec l’équipe DN le samedi sur la commentryenne, et le lundi à Foissiat. Rien de mieux que les courses de première catégorie pour passer un palier.
Commentry, je connaissais de nom, puisque l’an dernier c’est le junior Pierre-Henri Lecuisinier qui s’y était imposé. Comme quoi, aucun complexe à avoir pour nous. Pourtant, la liste de départ donne à la course une allure d’Elite Nationale : Saint Etienne avec Xavier Brun et Julien Liponne, Orléans avec Julien Maingot et Médéric Clain, Chambéry en nombre avec Axel Domont, Mathieu Teychenne ou Thomas Welter, Chalette avec Anthony Tevenot, le CRC Limousin avec Herbreteau, Christophe Goutille et Nicolas Morel, le Velo Club Caladois et beaucoup d’autres encore… Le parcours m’inspire beaucoup. Une course en ligne de 125 kilomètres, toujours en prise avec de nombreux petits cols de 2-3 kilomètres, sans jamais de portion trop raide cependant.
Pour nous driver, Jérôme Mainard et Maxime Mayençon sur le vélo, Aymeric Brunet au volant de la voiture mais pas de Jean Charles Romagny qui doit rentrer sur Roanne après avoir défoncé le camion à l’aller.
Le départ est donné de nouveau sous un grand soleil, avec les premières vraies chaleurs, qu’on sait apprécier après le week-end dernier. Tout le monde est décontracté, certains un peu trop puisque la radio nous annonce rapidement l’abandon d’un coureur suite à une chute en voulant sauter un terre plein. Xavier Brun nous apprendra à l’arrivée que sa fourche aurait rompu en sautant ? Bien placés, on sait tous que la course pourrait se faire très rapidement, surtout qu’on nous annonce un long faux-plat montant avec un peu devant. Le premier attaquant, dès le lever du drapeau, n’est autre que le favori numéro un Axel Domont. Surpris, personne ne prend sa roue dans un premier temps. Il se retourne beaucoup mais ne se relève pas. Bien entendu, les attaques se succèdent rapidement à l’arrière et nombreux sont les coureurs qui veulent avoir leur dossard dans la liste des échappés, les roannais autant que les autres. Je reste placé en tête de peloton, et je suis à peu près une attaque sur deux lorsqu’elles se forment, sans jamais pouvoir deviner laquelle sera la bonne. Manque de chance, le bon groupe part rapidement sans moi, ni sans aucun roannais d’ailleurs, et celui-ci commence à prendre irrémédiablement du champ, sans que nous ne puissions faire grand-chose à l’arrière. Lorsqu’on tourne pour se diriger sur une petite route en descente que j’aborde mal placé, le peloton s’étire fatalement et le groupe de tête d’environ 8 coureurs disparaît de notre perspective.
Chambéry, par bonheur, tente de constamment relancer la course, tous veulent avoir leur place à l’avant, et quelques autres qui n’ont pas abdiqué non plus. Ainsi Paul et Jérôme parviennent à se glisser dans un petit groupe de 4 qui va rentrer à l’avant. Après quelques kilomètres de bataille où je suis plutôt assez passif, je place un contre et reprends un petit groupe de trois coureurs, avec un stéphanois, un rose de Charvieu et Thomas Welter de Chambéry. Malheureusement, je me rends compte après quelques relais que seul Welter semble décidé à revenir devant, les deux autres sautant un relais sur deux. Le groupe de tête était pourtant peu de temps devant, et le peloton avait laissé partir. Il lui suffira d’accélérer un peu à la faveur de deux ou trois attaques de suite pour nous reprendre, au fond d’une cuvette et peu de temps avant une première montée assez raide.
Au pied de la montée, le peloton se reforme, compact, et sur la chaussée étroite plus personne ne peut passer pour attaquer de derrière. L’écart augmente donc rapidement, et le groupe qui était de nouveau à une portée de fusil disparaît encore une fois. Dans la partie la plus raide Christophe Goutille place une attaque très violente et prolonge son effort à une vitesse hallucinante jusqu’à la bascule plus haut. Le peloton ne veux pas le laisser rentrer si facilement et le rythme s’accélère brusquement, je me laisse rétrograder un tout petit peu. Lorsqu’une fois qu’il est repris le peloton temporise quelques instants, deux ou trois coureurs en profitent pour sortir les uns après les autres, j’en fais de même après quelques instants d’hésitation. Je dois fournir un très gros effort pour recoller à la queue d’un groupe qui s’organise déjà et qui lui, semble bien armé pour faire la jonction sur la tête de course.
Notre groupe est assez conséquent et homogène, avec une grosse dizaine d’unités. Beaucoup de clubs sont représentés dont pas mal de clubs qui me sont assez étrangers comme le CRC Limousin, l’UV Limousine, le Guidon Chalettois ou le GC Orléans Loiret. Le moteur de ce groupe est incontestablement l’ancien coureur professionnel Médéric Clain qui est parvenu à organiser ce groupe à la perfection, sans aucun accroc : une technique très simple : celui qui ne passe pas son relais pour une quelconque raison subit immédiatement soit une cassure, soit un gros coup de vis, en plus de pas mal de noms d’oiseaux. Je ne suis pas parvenu à récupérer de l’effort que j’ai du fournir pour recoller à la queue de ce groupe juste à temps ;  en conséquence, je souffre énormément pour prendre le même nombre de relais que les autres à un train aussi élevé, sous peine de passer à la trappe immédiatement, comme c’est déjà le cas pour de nombreux autres coureurs. Nous empruntons maintenant une longue portion de route très large et très roulante au bout de laquelle on peut apercevoir systématiquement le groupe de tête, qui s’est enrichi à une quinzaine d’unités. Les relais sont absolument parfaits et reviennent donc très rapidement, je ne pourrai pas tenir toute la course à ce régime. Je trouve que l’écart diminue pourtant très lentement, en tout cas largement trop à mon goût. Il faudra attendre presque le kilomètre 40 pour que les deux groupes fusionnent enfin à la faveur d’une petite descente. Environ 25 à 30 coureurs se trouvent alors en tête de course et il va falloir, je pense, s’adapter très vite à cette nouvelle physionomie.
Je ne m’accorde pas le temps d’encaisser la poursuite, je me replace immédiatement dans les dix premiers du groupe. Les attaques fusent déjà ! Je suis complètement persuadé que le groupe va de nouveau se casser et que les plus déterminés seront à l’avant, il faut donc en être à tout prix. J’en glisse un mot à Paul. Après une courte descente, nous retrouvons une petite vallée encaissée et logiquement, une nouvelle ascension, répertoriée celle-ci au classement des grimpeurs. Je l’aborde en 4 ou 5e position aux côtés de Paul. Immédiatement au pied, Axel Domont place une attaque assez puissante et s’isole à l’avant. Paul réagit et navigue tout seul en deuxième position, en parvenant à maintenir l’écart. De mon côté je n’ose pas faire l’effort dans la bosse de peur que le coup puisse partir juste sur le sommet comme c’est très probable, si la jonction s’opère avec Domont. Je prends la roue d’un groupe qui se forme juste derrière avec Liponne et Teychenne et qui monte lui aussi à une allure élevée. J’ai bien géré mon effort et sur le sommet, lorsque je constate que mon groupe a bel et bien creusé un écart sur le reste de l’échappée, je suis capable de collaborer à 100%, si bien que l’écart se creuse rapidement.
La situation a en une vingtaine de kilomètres carrément tourné en notre faveur. A l’avant je retrouve donc bien entendu Paul qui a été repris par notre petit groupe, ainsi que Jérôme Mainard qui a pris les bonnes roues dans le GPM. Nous accompagnent pour Chambéry le duo Mathieu Teychenne – Axel Domont, pour Saint Etienne Julien Liponne et Georges Lestage, pour l’UC Felletin le trio Julien Lamy – Jérôme le Solliec – Jean Luc Masdupuy pour le Guidon Chalettois Anthony Tevenot, pour le GC Orléans Loiret Julien Maingot, Jonathan Boucher et Médéric Clain, Mathieu Lemoine de Montmarault et Guillaume Gerbaud de l’Angoulême VC. Le groupe s’entend plutôt bien et je sens que tout le monde ici avait flairé le bon coup. Cette fois, je pense que ce groupe a toutes les cartes en main pour se jouer la victoire.
Jérôme nous conseille et nous encourage souvent. Il me dépanne d’un bidon lorsqu’un peu plus loin et alors qu’Aymeric n’est pas encore arrivé à notre hauteur avec la voiture je me retrouve en panne de bidons, et que le soleil tape maintenant au point de parfois croiser des plaques de goudron fondu sur le sol. A chaque sommet de GPM, le rythme s’accélère et Axel Domont lance son coéquipier Teychenne, pendant que sur les rush, c’est Teychenne qui lance Domont. Les deux chambériens semblent de loin les plus à l’aise du groupe et pour moi, ce sont eux qui ont les cartes en main pour relancer la course au moment où ils le souhaiteront. Pendant ce temps, je m’accroche dans les GPM, les sensations sont très bonnes et je me sens en forme mais à ce niveau ça grimpe toujours très vite. Les kilomètres défilent sans que la situation ne change, seul l’écart continue d’augmenter régulièrement et nous assure maintenant une marge très confortable de près de trois minutes sur le groupe suivant, nous annonce l’ardoisier. Je vais prendre les derniers conseils et les derniers bidons au niveau de la voiture d’Aymeric.
A 35 kilomètres de l’arrivée sur une petite portion de route boisée en ligne droite, Mathieu Teychenne nous surprend tous par une attaque de derrière. Encore peu préparés à déjà gérer le final de la course, les autres coureurs ne réagissent pas tout de suite. Du pain béni pour Axel Domont qui, dès lors, n’a plus qu’à se laisser glisser à l’arrière du groupe et à se faire oublier. Teychenne commence à prendre de l’avance, je sens que Jérôme est assez agacé de la situation, il veut vraiment la victoire. Dans la portion montante qui suit, il place un démarrage. Je m’écarte et laisse le trou mais les autres coureurs réagissent du tac au tac. Lorsque Julien Liponne contre sur le sommet, personne n’est vraiment capable d’y aller, même si son attaque est plutôt timide. Liponne met peu de temps à revenir sur Mathieu Teychenne qui sous le coup de l’accélération du groupe a perdu beaucoup de temps. Seulement derrière, Domont est revenu casser les relais en tête de groupe et dissuader l’entreprise de tous ceux qui auraient des volontés offensives, Jérôme en premier. A cette occasion, j’ai pu constater des forces en présence, et remarquer que j’avais encore de la force même si la chaleur et la distance ne sont pas loin de se transformer en crampes. Je travaille au mieux à organiser le groupe, du moins ceux qui sont motivés pour mener la chasse, afin que Jérôme puisse se battre avec Axel Domont pour la victoire. L’écart nous est annoncé deux fois de suite à 20 secondes, puis à trente.
Le groupe, déjà pas très enjoué, se décourage encore plus. Je me tiens donc prêt de nouveau à observer des attaques qui ne viennent pourtant pas encore. Le prochain GPM qui intervient ensuite sera certainement déterminant. Les premières pentes éliminent les coureurs les plus entamés, dont malheureusement Paul fait partie. Notre groupe ne compte dès lors plus que 7 ou 8 coureurs. Sur le sommet, les attaques font rage, et il reste plus de jus à certains qu’à d’autres. J’ai du mal à décrypter mes sensations, à savoir où est ma limite exactement. Je sais aussi qu’en tenant de l’atteindre, je risque d’appeler les crampes qui pourraient ressurgir brusquement en cas de sprint à l’arrivée.
Jérôme parvient à sortir à la faveur du sommet de la côte, mais avec Domont logiquement sur le porte bagage. Le groupe derrière explose à moitié en fonction de l’état de fraicheur des coureurs, mais se recompose ensuite, à l’exception de Julien Maingot qui a crevé de l’arrière en plein milieu de la bataille. Avec Jérôme à l’avant, je suis en position de force pour les 10 derniers kilomètres : je n’ai plus à coopérer et j’en profite pour arriver le plus frais possible pour le sprint. Je me méfie cependant des trous ou des attaques qui peuvent venir de coureurs expérimentés comme Médéric Clain ou Julien Lamy. Je connais le final et l’arrivée me convient, il y a trois coureurs à l’avant, je dois viser la 5e place. Je commence à être tendu à partir du kilomètre car je ne sais pas si je dois remonter ou considérer la dernière place du groupe comme une position avantageuse qu’il ne faut pas lâcher. Au vu de l’état de fraicheur de tout le monde, je parie sur un sprint à l’usure et je remonte donc en 2 ou 3e position dans la route d’Antony Tevenot. Il lance le sprint à 250m de la ligne d’arrivée : je commence à le déboiter à 100m, avant de prendre une violente crampe dans la cuisse droite. Je coupe mon effort, relance assis en résistant à une autre crampe pour conserver ma place, me fais sauter par Médéric Clain pour la 6e place.
Je termine donc 7e, très satisfait de ma course dans son ensemble, pour une place qui a beaucoup de valeur autour de tels grands noms du cyclisme amateur. Me devancent, quand même, Mathieu Teychenne qui remporte la course en solitaire (stagiaire professionnel chez Ag2r la Mondiale pour la 3e année de suite), Axel Domont qui offre le doublé au Chambéry CF (vainqueur d’une étape sur le récent Toscane – Terre de Cyclisme en coupe des nations espoirs), Jérôme Mainard mon coéquipier (ex champion Rhône Alpes elite), Julien Liponne et Antony Tevenot (vainqueurs de nombreuses fois en Elite) et Médéric Clain (ancien professionnel chez Cofidis). Paul parvient de son côté à sauver sa 15e place de peu face au peloton qui arrive juste derrière lui, à plus de 5 minutes.
J’ai hâte de concrétiser tout ce que j’ai appris aujourd’hui à Foissiat lundi. Je serai le seul roannais avec Aymeric au départ qui cette fois m’accompagnera au sein du peloton et non plus derrière. Je tiens une grosse forme ce week-end et c’est peut-être le moment d’en profiter pour aller chercher une victoire en première catégorie.