#19 Interrégion Mieussy
#19 Interrégion Mieussy

#19 Interrégion Mieussy

L’attente est pesante et l’envie de bien faire est là. L’arrivée ne me plait pas trop à cause de sa bosse, et de son virage à plus de 90° au départ du sprint comme Carces…Comme je sais, au départ de cette finale que c’est la première fois sur une grosse course cette année que j’ai les jambes pour jouer la gagne j’ai décidé de miser sur une échappée, quitte à aller la déclencher moi-même. Sur le papier, le profil me plait beaucoup et la distance aussi : j’ai bien récupéré du chrono.
6km de fictif, je veux rester tranquille en première partie de course pour profiter de la distance donc je ne cherche pas à remonter. J’évite une, deux, trois chutes de très peu. Au milieu de la chaussée, il y a une fissure qui s’étend sur plusieurs kilomètres. Ca va être tendu toute la course… Le départ est donné devant sant qu’on le sache trop derrière et Pierrick Raffin sort rapidement tout seul sans que le peloton ne juge la menace suffisamment importante pour réagir. Moi je n’apprendrai cela qu’une dizaine de kilomètres plus loin alors qu’il a déjà plusieurs minutes d’avance. Le peloton n’a pas encore dépassé les 30km/h… Je décide de m’arrêter au bout de quelques kilomètres pour aller pisser, ne me sentant pas capable du numéro d’acrobate de Paccalet ni de me pisser tout simplement dessus comme Jérémy ^^ Une petite dizaine de voitures de directeurs sportifs me passe, derrière la file s’étend à l’horizon. Cette image m’impressionne, je n’avais encore jamais vu la course sous cet angle. Après quelques sauts de puce rapides entre voitures, je rentre facilement dans un peloton toujours aussi amorphe et me replace tout de suite devant. On arrive à Morillon et commencent les premières escarmouches, on croit dans un premier temps que Raffin est repris mais non, alors quand on arrive dans la première bosse je commence à me replacer sérieusement devant. Pierre André emmène tout de suite un gros rythme et l’écrémage est très rapide. Autour de moi beaucoup commencent à rétrograder. Quand je vois que le coeur est encore raisonnablement haut je remet quelques dents et j’attaque. Pas très brutalement mais je poursuis mon accélération pendant très longtemps, presque jusqu’au sommet où je me rassois. Derrière dans la roue il n’y a que, comme d’habitude, Pierre André Anizan. Un peu plus loin Quentin Driot qui étire et casse le peloton en morceaux… Pierre André ne passe pas de relai avant le basculement et on s’entend assez mal, on ne veut pas se donner à fond. Je referme la veste et on bascule dans la descente à deux, juste avant d’être repris par une poignée de coureurs, une dizaine, pas plus. On avale Raffin ici, d’un coup : il était bien encore devant…
Les attaques fusent dans la descente et le groupe se reconstitue, dix, vingt gars maintenant sont revenus. Contre sur contre, chacun y va de son petit sac même si tout le monde sait qu’il est impossible de creuser le trou. Souvent à 70, parfois à 80km/h dans les lignes droites je suis un peu moins à l’aise dès que ça tourne, peut être les séquelles des glissades de Saint Genis… En bas ça tourne à droite et c’est parti pour de la ligne droite vent de face. Simon Favre, Maxime Charvin, Benjamin Jasserand essaient de sortir ici et je me dépouille pour aller chercher tous les savoyards. La troisième place du Challenge, c’est peut être aussi ma sélection pour les France. Je retourne me cacher un peu au bout du troisième et laisse le boulot aux autres. Pour le Rhône, tout le monde est ici. On est maintenant peut être quarante, cinquante dans le peloton à la faveur des à-coups et du vent de tronche. La seconde bosse me surprend et quand je cherche à remonter devant, Chamerat nous gratifie d’une magnifique attaque de derrière. Elle tétanise tout le monde et Driot réagit avec un temps de retard mais très fort lui aussi. Je suis pris au piège dans un goupe derrière. Cette attaque a scindé le peloton en groupes d’une dizaine de coureurs. Il y en a deux devant le mien : j’accélère et fais la jonction au second groupe, accélère encore et rejoins le premier. Antony est repris et sans temporiser je poursuis sur ma lancée et contre. Dans ma roue toujours les mêmes, pour moi les deux hommes forts de Rhône Alpes : Quentin Driot et Pierre André Anizan. J’attends le sommet avec impatience, mais il ne vient pas : j’ai sous estimé la longueur de la bosse ! alors que je prenais des gros relais je commence à en sauter un ou deux, et à les prendre plus courts. J’essaie de retarder l’arrivée dans la zone rouge au plus tard, si possible avant le bascuement… Derrière nous il y a un petit trou et un groupe étiré d’une douzaine à nouveau. Le sommet ne vient toujours pas. J’ai un poil récupéré et Pierre André attaque violemment, je me fais le cul pour tenir les roues et y parvient finalement plutôt bien. On temporise, et au moment où ça se regroupe je craque. Je perds une quinzaine de places et arrive à m’accrocher à la queue du groupe de tête pour l’instant. Plus le sommet approche, plus je rétrograde… Le pire, c’est qu’il arrive progressivement et qu’on ne bascule pas vraiment… Les coureurs restés dans les roues et à bloc dans la bosse commencent à se découvrir dans les faux-plats et on termine le premier tour pour retrouver les faux-plats descendants du matin.
Tout s’emballe toujours autant, et le peloton n’est plus mainteant qu’un long serpent de coureurs, qui se casse parfois, puis se reconstitue… Jérémy a pris ma place aux avants postes et c’est lui maintenant qui va dans les coups et chercher les savoyards très actifs et plutôt costauds, jusqu’au rond point où pour la première fois depuis plus de 10km, ça temporise. Je me suis plutôt refait la cerise et quelques escarmouches plus loin je trouve un moment opportun pour accompagner un pyrénéen je crois, ou un garois un peu téméraire. Longues lignes droites plates, mais vent de dos cette fois qui me permettent de gérer un peu mieux mon effort. Sur un kilomètre environ on se relaie le peloton aux fesses puis il se relève, ou craque, toujours est il que je me retrouve seul en tête. Quand je me retourne, je vois de l’Isère, de la Loire, de la Savoie rouler mais je tiens toujours très bien devant, ce qui me redonne confiance. En plus, les gars font bien leur travail derrière. L’aventure, que je sais complètement inutile mais je tiens à la prolonger quand même pour l’honneur, continue quand même sur plusieurs kilomètres. Quand je ne suis plus qu’à une portée de fusil je me relève et après une courte temporisation un pyrénéen attaque. Temps mort, Driot sort fort de derrière. Ca se regarde beaucoup, bien trop à mon goût et je vais moi même rouler devant. Immédiatement les ligériens se regoupent derrière moi et rendent tout relai impossible. Pierre André vient quand même me soulager un peu. Je tente de venir à son aide, mais physiquement j’accuse le coup. Chamerat contre pour tenter de rentrer seul et je me sens vraiment piégé. L’Isère ne va plus nous aider, il ne reste que la Savoie, et encore… Mais, alors que ça attaque et qu’un petit groupe se forme, les relais tournent à nouveau et notamment… Pierre André, qui roule sur son équipier. Je ne tente pas de le raisonner puisque moi ça m’avantage bien. Finalement, on rentre, et c’est le moment idéal pour en remettre une. Chamerat anticipe et on seort à deux mais la tentative avorte vite. Changement de route, je choisis de retourner hiberner derrière, puisque j’en ai beaucoup fait en une vingtaine de kilomètres. En plus, la bosse ne va pas tarder à revenir…
Quelques coups sortent, puis je me désintéresse un instant de la tête. Je me rends ensuite compte qu’on échappée est sortie avec Nans, Romain et Cédric. J’essaie alors de remonter casser les relais isérois, qui sont pour une fois piégés. C’est une occasion en or pour nous. La bosse arrive et les trois de tête résistent toujours aussi bien, il y a une quinzaine de secondes. Je n’y crois pas trop à cause de la bosse par contre c’est une situation de course parfaite pour un contre. Je le prépare au même endroit qu’au tour précédent. Cédric et Romain sont bien repris dans la bosse, mais Nans résiste encore un peu tout seul. Le sommet approchant je remets mon attaque du tour précédent, mais j’ai déjà moins de punch. Benjamin Jasserand m’accompagne et on se relaie dès le basculement mais il manque un ligérien devant et nous on est aussi bien à fond… Je ferai à peine 10m de plus en tête quand Iapteff rentre suivi du reste du peloton bien compact. La descente fuse toujours aussi rapidement : attaques sur attaques comme d’habitude. Je manque de lucidité et préfère rester un peu derrière. La fin de course va être un peu plus difficile, et un peu ratée… Je reste un instant discuter avec Adrien et Kévin derrière, on annonce une chute assez grave dans la descente. Je compte, un, deux, trois quatre, cinq, il manque le 6e… J’ai eu un peu peur sur le coup mais c’est simplement Damien qui est en échappée devant, ça me rassure ^^ Le peloton est étiré et je remonte dans le vent, mais c’est forcément plus difficile, alors je marque quelques pauses et me fais surprendre à nouveau par l’arrivée de la bosse. Je suis derrière mal placé mais ça ne me dérange pas car maintenant la seule carte que je peux jouer est celle du sprint. Je ne refais pas l’erreur du tour précédent, je reste bien au chaud au départ, et du coup la bosse semble passer beaucoup plus vite. Le sommet me surprend. Je vois Adrien accélérer devant, pour me lancer un sprint qui n’aura jamais lieu. Enfermé, je me rends compte du piège trop tard. Ca roule vite mais c’est très compact, il n’y a pas de vague, pas de trou. Je me place sur le côté gauche pour espérer remonter mieux : mauvais choix, il y a des poteaux en plastique et je manque de m’en manger un ou deux. Damien juste devant moi a le même problème et se sacrifie en me laissant gentiment passer. Mais c’est cuit. Tant pis, au virage je suis loin et complètement dépité mais je me fais mal pour remonter au mieux dans la bosse. Je remonte une quinzaine de gars, ce qui est déjà satisfaisant en soi mais ça reste une 16e place décevante sur une arrivée taillée pour moi en toute logique. Vraiment déçu, pour moi et pour l’équipe, mais bon, il reste que les jambes étaient là et le seront aussi dimanche prochain. Dimanche prochain pas de sprint massif. C’est un peu la dernière chance de marcher sur un grand rendez vous en cadet, la louper serait une catastrophe. La réussir, une belle revanche sur le destin…